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Ici l’influence sémitique, là celle des peuples du Nord expliquent vraisemblablement cette transformation. Mais les vieilles religions d’Orient qui, dans leurs cosmogonies, accordaient une si large place au principe féminin et qui, quand le monde presque entier fut fondu dans l’unité romaine, pénétrèrent les peuples méditerranéens et ceux mêmes de l’Occident ; mais l’évolution naturelle d’une civilisation où l’intelligence et les arts de la paix comptèrent plus bientôt que la force et les aptitudes guerrières, ramenaient, à la fin de la période romaine, la société (du moins celle de l’Europe, de l’Asie occidentale et de l’Afrique du Nord) au point où l’évolution du régime matriarcal l’avait déjà, quelques milliers d’années auparavant, conduite : l’égalité complète des deux sexes. Une double révolution matérielle et morale va une deuxième fois faire perdre à la femme le bénéfice de toutes ses conquêtes et la ramener de nouveau à une dure servitude. La révolution matérielle, c’est la catastrophe où, sous les flots des hordes septentrionales, s’engloutit le monde antique ; la révolution morale, c’est l’avènement du christianisme.

Comme ces envahisseurs qui, plusieurs millénaires auparavant, avaient submergé la première civilisation méditerranéenne, les Germains vont apporter avec eux le culte de la force ; comme les premiers législateurs religieux, Moïse, Manou, Confucius, les organisateurs de l’Église chrétienne voient en la femme le « vase d’impureté ». Sous cette double influence, la femme perd, pour de longs siècles, tout le terrain péniblement gagné. Mais la barbarie militaire des Germains, mais la théologie chrétienne