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à ses avantages naturels ». Et voici (est-ce de l’histoire ou une anticipation ?) sa biographie. Amten est une fille de la bourgeoisie. Son père, maître scribe, la fait entrer dans l’administration royale. La voilà rédactrice à un ministère. Intelligente et remarquée par ses chefs, elle gravit tous les échelons de la hiérarchie ; elle quitte l’administration centrale pour devenir sous-gouverneur de province.

Dans le district qu’elle gouverne, ses talents se révèlent éminents. Le Pharaon la distingue et lui donne un brillant avancement. La voilà nomarque, c’est-à-dire préfet de Crocodilopolis. Les fonctions civiles n’étant pas rigoureusement séparées des fonctions militaires, la préfète Amten devient bientôt générale et « commandante des portes de l’Occident ». Sans nul doute elle se montra à la hauteur de sa tâche nouvelle. Et la hiérarchie militaire elle-même lui réserve de nouveaux honneurs. Placée à la tête d’une importante province, elle a sous sa direction toutes les troupes garnissant les frontières de la Basse-Égypte. Elle dut brillamment défendre ces frontières contre les pillards du désert : pourvue par la grâce royale d’un riche fief, seigneur de forts châteaux et de terres fertiles, elle mourut comblée d’honneurs.

Carrière extraordinaire — pour nous, modernes — que celle d’Amten et bien faite pour faire pâlir par comparaison les plus beaux rêves de nos féministes ! Et carrière qui montre la femme égyptienne exerçant, cinq mille ans avant notre ère, la plénitude de ses droits de citoyen. Il ne s’agit ici ni d’une grande dame pourvue d’une seigneurie par droit d’héritage et, comme le feraient nos châtelaines du moyen âge,