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Et toute jeune encore elle fait, au déclin de l’empire, des conférences applaudies. La guerre de 1870 la trouve à la tête d’une ambulance. Après la Commune, et pendant les années où, dans l’incertitude, s’élabore la République, elle est de ceux qui contribuent à fixer le destin. Lors du 16 mai, sa propagande est active ; tout en restant mondaine et grande dame, elle n’épargne ni fatigues ni argent pour, dans le département de Seine-et-Oise où ses propriétés lui assurent une grande influence, faire campagne contre l’ordre moral. Elle triomphe et, jusqu’à la fin de sa vie, grande électrice et aussi puissante qu’une baronne en son fief, elle devient l’un des leaders de l’anticléricalisme. Elle organise avec Schœlcher le premier congrès anticlérical ; la première de toutes les femmes, elle est accueillie par une loge maçonnique. Ennemie d’ailleurs d’un bouleversement immédiat de la société, elle vise cependant à préparer pour le monde un meilleur avenir, et en aperçoit dans l’affranchissement de la femme l’essentielle condition. Esclave de la loi masculine, la femme sans cesse tourne cette loi ; elle est pour l’homme une perfide ennemie, et de là naissent combien de malheurs !… « Il est contre nature qu’un être raisonnable abdique les plus nobles attributions de l’humanité. » C’est cependant ce qu’a fait la femme, ou plutôt ce qu’on a fait pour elle ; et, sous l’influence évidente de Stuart Mill, elle demande qu’on tente l’expérience de la libération féminine. Nul doute que tant de forces aujourd’hui perdues ne puissent être employées pour le plus grand avantage de la société. Nul doute que, quand la femme se sera pleinement réalisée, l’humanité ne soit plus heureuse.