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de faire abstraction un instant de leur « cher moi masculin » pour combattre avec lui l’injustice, il évoque la vision d’une société phalanstérienne où, tous les travaux du ménage faits en commun et mécaniquement, la femme, déchargée de sa servitude, pourra, comme l’homme, développer son esprit.

À la voix de Bebel, les camarades socialistes s’éveillèrent ; se rappelant que le prophète Karl Marx avait, dans le fameux manifeste de 1847, protesté contre toutes les inégalités, même celle des sexes, ils firent de l’affranchissement des femmes l’un de leurs dogmes. L’émancipation économique et politique des femmes est l’un des articles du programme d’Erfürt (1891). Et bientôt apparaissent les conclusions pratiques. En 1892, une femme, Clara Zetkin, entre dans les conseils du parti.

En 1895, Bebel, imitant jusqu’au bout Stuart Mill, dépose à la tribune du Reichstag un projet de loi accordant aux femmes le vote parlementaire. C’est un échec. Mais, du moins, le féminisme gagne par ailleurs du terrain : à côté des deux anciens groupements féminins apparaissent les associations ouvrières féminines, les Unions de femmes socialistes qui, elles, envisagent l’affranchissement des femmes pour le « grand soir » (l’avenir leur a donné raison) et la Fédération des Unions de femmes allemandes qui, en 1900, groupe 137 sociétés et 110 000 membres.

Si elle ne peut encore amener l’affranchissement politique des femmes, leur action, du moins, ne demeure pas vaine. Les femmes obtiennent l’égalité d’instruction : les écoles primaires, secondaires, professionnelles se multiplient ; les portes des antiques universités s’ouvrent toutes grandes ; les doc-