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en outre, lui mettant sous les yeux son propre exemple ainsi que d’autres non moins sages et bons, à supprimer de son langage, à rayer de ses livres ce qu’il avait pu dire ou écrire de blessant pour des oreilles catholiques. Et ainsi a-t-il été fait. Il a été, il est reveuu, et à son retour, il a annoncé que toutes les vieilles querelles avaient été étouffées, et que la paix était faite avec l’abbé de Clairvaux, par l’intermédiaire de l’abbé de Citeaux.

Alors, soit influence de nos conseils, soit plutôt inspiration de Dieu, il a déclaré que, renonçant au tumulte des cours et des études, il choisissait pour retraite définitive votre abbaye de Cluni. Dans la pensée que cet asile convenait à son âge, à sa santé, à sa piété, et dans l’idée que son savoir, qui ne vous est pas, sans doute, complètement inconnu, pouvait être utile à la grande multitude de nos frères, nous avons fait accueil à son désir, et si votre bonté y consentait, nous le recevrions avec plaisir et joie parmi nous, qui vous sommes, vous le savez, absolument dévoués.

Je vous demande donc, si humble que je sois, mais vous appartenant du moins de cœur ; le couvent de Cluni qui vous est si étroitement attaché, vous demande, maître Pierre vous demande lui-même, par nous, par vos fils porteurs des présentes, par ces lettres qu’il nous a prié de vous écrire, de le laisser achever dans l’abbaye de Cluni les derniers jours de sa vie et de sa vieillesse, qui, sans doute, ne seront pas bien nombreux. Que les instances de quelques ennemis ne puissent le faire chasser de l’asile, qu’humble passereau, du nid que, pauvre tourtereau, il se réjouit d’avoir trouvé, ou qu’elles ne viennent pas l’y troubler ; que le bouclier de la défense Apostolique le protège, lui aussi, comme vous protégez tous ceux qui le méritent.




II

LETTRE DE PIERRE, ABBÉ DE CLUNI


A sa respectable et très-chère sœur en Jésus Christ, Heloïse, abbesse, son humble frère, Pierre, abbé de Cluni : le salut que Dieu a promis à ceux qui l’aiment.

La lettre de votre charité, que vous m’avez dernièrement envoyée par mon fils Thibault, m’a pénétré de joie ; et en considération de la personne qui l’avait écrite, je l’ai reçue avec un sentiment d’affection. J’ai voulu vous récrire aussitôt ce que j’avais dans le cœur ; les exigences de mes