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HYMNES D’ABÉLARD.

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bien Prudence et d’autres qui vinrent après eux, — la mesure y est souvent si incorrecte que les paroles peuvent à peine s’adapter au chant ; et sans le chant cependant, il n’y a point d’hymne possible, car la définition de l’hymne est la louange de Dieu chantée. •

Vous ajoutiez jme pour le plus grand nombre des fêtes, il nous manquait des hymnes spéciales, par exemple pour la fête des Innocenta, pour celle des Évangélistes et pour celle de ces Saintes qui ne furent ni vierges, ni mar- tyrs. Il en est même, distez-vous, qui obligent à mentir ceux qui les chan- tent, soit parce qu’elles ne s’appliquent pas au temps, soit par ce qu’elles sont mêlées d’inexactitudes : ainsi n’est-il pas rare que, soit par empêche- ment formel, soit par dispense, les fidèles devancent ou laissent passer l’heure prescrite ; si bien qu’ils sont obligés de mentir, au moins en ce qui concerne le temps, chantant le jour les hymnes de la nuit ou la nuit les hymnes du jour.

Il est certain, disiez-vous encore, que, suivant l’autorité des prophètes et la règle de l’Église, on ne doit pas cesser, même pendant la nuit, de chanter les louanges de Dieu, ainsi qu’il est écrit : « Je me suis souvenu, la nuit, de ton nom, Seigneur ; • et ailleurs : t Au milieu de la nuit, je me levais pour me confesser à toi, » c’est-à-dire pour te louer ; tandis que les sept autres louanges dont parle le prophète : « Sept fois dans le jour, j’ai chanté ta louange, » ne peuvent se chanter que le jour. La première hymne qu’on appelle louange du matin, et dont il est dit dans le même prophète : « Le matin, Seigneur, je méditerai sur toi, » doit se célébrer au point du jour, dès que l’aurore ou Lucifer commence à luire.

La plupart des hymnes portent ces indications. Quand, par exemple, il est dit : c La nuit, levons-nous et veillons toutes ; • et ailleurs : c Nous cou- pons la nuit par un chant ; ou : c Nous nous levons pour confesser ta gloire, et nous coupons les longueurs de la nuit ; » et ailleurs : « La nuit couvre toutes les nuances des choses de la terre ; » ou : « Nous nous levons de notre lit pendant le calme de la nuit ; • et encore : « Nous rompons les longueurs de la nuit par un chant ; » et autres chants semblables, les hym- nes témoignent assez d’elles-mêmes qu’elles sont des hymnes de nuit. De même, les hymnes du matin portent souvent l’indication du moment spé- cial où elles doivent être chantées. Par exemple, quand il est dit : t Voici que l’ombre de la nuit commence à s’affaiblir ; * et ailleurs : « Voici que se lève le jour doré ; » ou bieu : « L’aurore commence à éclairer le ciel ; » ou : « L’éclat de l’aurore resplendit ; et ailleurs : « L’orient avant-coureur du jour chante la prochaine apparition de la lumière ; » ou : • Lucifer brille dans tout l’éclat de son lever ; i par ces mots et d’autres de même nature, les hymnes nous apprennent à quels moments elles doivent se chanter ; lors donc que nous n’observons pas ces moments, nous les faisons mentir en les chantant. Pourtant ce qui empêche cette exacte observation le plus souvent, c’est moins la négligence que la nécessité ou quelque dispense, comme il