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ples qui ignorent Dieu, mais en état de sanctification et d’adoration, comme les fidèles qui ignorent en Dieu. L’homme, en effet, use du mal de la concupiscence, il n’y succombe pas quand il le règle, quand il contraint ses élans déshonnêtes et les enchaîne, ou quand il ne leur laisse leur liberté et leur essor qu’en vue de la propagation, en vue d’engendrer charnellement des êtres qui doivent Être régénérés spirituellement, et non de soumettre l’esprit à la basse servitude de la chair. »

Et ailleurs, au sujet de l’union de Joseph et de Marie : « Tout le bien du mariage a été accompli dans les père et mère du Christ : la génération, la fidélité, la consécration ; la génération, nous en voyons le produit dans le Seigneur Jésus-Christ lui-même ; la fidélité, puisqu’il n’y a pas eu d’adultère ; la consécration, puisqu’il n’y a pas eu séparation. La seule chose qui manque, c’est le commerce de la chair, parce qu’il ne pouvait avoir lieu que par le péché de la chair, parce qu’il ne pouvait s’accomplir en dehors de cette concupiscence de la chair, produit du péché sans lequel il voulut être conçu, lui qui devait être sans péché. Il voulut être engendré non dans le péché de la chair, mais dans l’apparence du péché de la chair, afin de" mon- trer que toute chair qui naît d’un commerce charnel participe au péché ; sa chair à lui seul n’étant pas née de ce commerce et n’étant pas une chair de péché. Toutefois le commerce du mariage qui a eu lieu dans la pensée de la génération n’est pas, par lui-même, un péché, parce qu’une bonne pensée dirige celui qui en subit l’a tirai l, parce que ce n’est pas le corps qiû suit l’amorce de la volupté, ni la volonté qui est traînée sous le joug du péché, le péché étant ramené à l’exercice légitime de la génération. »

Et ailleurs, au sujet de ce que dit l’Apôtre : « Je dis indulgence, non com- mandement. Ou il y a lieu d’accorder indulgence, on ne peut nier qu’il y ait faute. Puis donc que le commerce de la chair en vue de la génération, qui est le but propre du mariage, n’est pas coupable, à quoi s’applique l’in dulgence de l’Apôtre, si ce n’est au cas dans lequel les époux, ne contenant pas leurs désirs, exigent l’un de l’autre la dette de la chair, non dans la pensée de la génération, mais par l’entraînement du plaisir ? Plaisir non coupable à cause du mariage, et à cause du mariage pardonnable. Donc, même en cela, le mariage est louable, parce qu’il fait pardonner pour lui ce qui ne tient pas à lui. En effet, le commerce dont je parle, et qui n’est que l’effet servile de la concupiscence, ne se propose pas d’empêcher le fruit naturel du mariage. Autre chose est cependant de ne s’y livrer qu’en vue de la génération, laquelle est exempte de tout péché, autre chose d’y chercher l’attrait de la chair pour soi, ce qui est une faute vénielle.

Et ailleurs, livre second : « Nous ne condamnons pas le pain et le vin à cause de ceux qui s’abandonnent à la gourmandise et à l’ivresse, pas plus que l’or à cause des gens cupides et avares. Nous ne condamnons pas davantage le commerce honnête de la chair, à cause de ceux qui en abusent. 11