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QUESTIONS D’HÉLOÎSE BT RÉPONSES D’ABÉLIRD. 435

chevreau avec des laitues sauvages. Ce qu’il dit qu’il désira faire la Pàque, afin de pouvoir manger avec ses disciples avant de mourir, signifie qu’avant de mourir, il voulut rompre avec les vieux sentiments qui devaient être remplacés par des nouveaux. Cette indication si claire sur le nouveau Testa- ment : « Faites ceci en mémoire de moi, » marque, pour ainsi dire, la fin de l’ancienne loi et le commencement du règne de la nouvelle.

A ce mot, en effet : « Ceci est mon corps, qui est donné pour votre salut, » il ajoute aussitôt : « Faites ceci en mémoire de moi. 1 D’où ce commentaire de l’Apôtre : « Toutes les fois que vous mangerez de ce pain et que vous boirez de ce yin, vous annoncerez la mort du Seigneur. » Ainsi la célébration de la messe est la commémoration de la Passion du Seigneur, et tout fidèle doit y assister avec les sentiments de piété qui l’auraient ému en voyant le crucifiement.

Afin donc que le souvenir de la Passion du Seigneur soit bien gravé dans nos esprits et nous embrase d’amour pour lui, le sacrifice de l’immo- lation doit être chaque jour accompli sur l’autel. « Faites cela, dit-il, c’est- à-dire accomplissez le sacrifice de mon corps, qui n’est plus à livrer, mais qui a été livré pour vous, accomplissez-le en mémoire de ce témoignage d’amour, de telle sorte qu’enflammés vous-mêmes du feu de cet amour, vous puissiez avoir part au bienfait de la Passion. » Il a vouludonner deuxfois le même calice, afin de faire entendre par là que nous devons recevoir son calice, non-seulement par la participation au sacrifice, mais par l’imitation de la Passion. D’où cette parole du Psalmiste : c Je recevrai le calice du salut, • c’est-à-dire du vrai Jésus, en l’imitant par la vertu de la Passion. Et comme souffrir la mort n’est pas le fait de la nature humaine, mais un don de la vertu de Dieu, il faut invoquer Dieu qui peut nous donner cette sorte de vertu, où nous devons chercher moins nos’ propres avantages que sa gloire, ainsi que le signifie son nom. En effet, de même que l’on appelle ignominieuses les choses qui ne sont pas dignes d’avoir un nom, de même ces choses-là sont glorieuses qui sont dignes d’avoir un nom. Nous devons donc invoquer le nom de Dieu, lorsque nous accomplissons ce qui doit tendre à sa gloire, afin que ce soit lui plutôt que nous qui soit glorifié et loué en nous, lui à qui nous devons le don de faire ce que, sans lui, nous ne serions pas capables de faire. « Que celui qui se glorifie, dit l’Apôtre, se glorifie dans le Seigneur ; i c’est-à-dire que celui qui se reconnaît quelque vertu, quelque valeur, cherche à en tirer honneur non pas pour lui, mais pour Dieu ; qu’il en rapporte l’hommage non à sa vertu personnelle, mais à la grâce de Dieu, reconnaissant que cela vient non de lui, mais de Dieu.

Quant à ce calice que nous prenons pour reproduire le sacrifice de la Passion, il faut s’en rapporter à ce que le Seigneur dit aux fils de Zébédée : « Pouvez-vous boire ce calice que je vais boire ? » c’est-à-dire : penscz*vou» pouvoir m imiter dans le sacrifice de la Passion ? Et c’est bien de ce premier