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LETTRES D’ABÉLARD ET D’HÉLOlSE.

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Ce sont ces fleuves que l’Épouse, dans le Cantique des cantiques, célèbre à la louange de l’Époux, quand elle dit : « Ses yeux sont comme des colom- bes sur le bord des ruisseaux, des colombes qui se baignent dans le lait et qui séjournent près des fleuves au large cours. » Et vous aussi, vous baignant dans ce lait, c’est-à-dire resplendissant du pur éclat de la chasteté, demeures comme les colombes auprès des fleuves, afin qu’y buvant à longs traits la sagesse, vous puissiez non-seulement apprendre, mais enseigner, et indi- quer la route aux autres du regard, voir le divin Époux et le montrer.

Nous savons qu’au sujet de l’Épouse qui mérita l’honneur singulier de concevoir l’Époux par l’oreille du cœur, il est écrit : « Marie conservait tou- tes ces paroles et les amassait dans son cœur. » Cette Mère du Verbe éternel avait donc, non sur les lèvres, mais dans le cœur, les paroles divines, et elle les gardait précieusement, méditant chacune d’elles avec zèle, les rappro- chant les unes des autres, étudiant leur harmonie. Suivant le’mystère de la loi, elle savait que tout animal est impur, sauf celui qui rumine et qui a la corne fendue. En effet, il n’y a d’âme pure que celle qui rumine autant qu’elle en est capable, par la méditation, les divins préceptes, et qui appli- que son discernement à les suivre, en sorte que non-seulement elle fasse le bien, mais qu’elle le fasse bien, c’est-à-dire avec une intention droite. Quant à la corne du pied fendue, c’est le discernement dont il est écrit : « Si vous offrez justement, mais que vous ne partagiez pas de même, vous péchez. •

« Celui qui m’aime, dit la Vérité, conservera ma parole. » Or, qui pourra garder par l’obéissance les paroles ou les enseignements du Seigneur, s’il n’a commencé par les comprendre ? On n’a de zèle pour exécuter, que lorsqu’on a été attentif à écouter, ainsi qu’il est écrit de cette sainte femme qui, dédai- gnant tout le reste, s’assit aux pieds du Seigneur, pour entendre sa parole, fans doute avec les oreilles de cette intelligence qu’il demande lui-même, quand il dit : • Que celui-là écoute, qui a des oreilles pour écouter. »

Que si vous ne pouvez être enflammées de la même ferveur de piété, imites du moins, dans l’amour et l’étude des saintes lettres, ces bienheureuses disciples de saint Jérôme, Paule et Jtastochie, à la demande desquelles ce grand docteur a, par tant d’ouvrages, éclairé l’Église.

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