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Par de nouveaux reſpects combattre voſtre cœur :
Vous ne me reverrez que maiſtre & que vainqueur.







Scène II



VIRGILIE ſeule.


QUoy ? de ce deſeſpoir dois je craindre la ſuite ?
Non, qu’Aufide pluſtoſt ſonge à prendre la fuite.
Il menace en vain Rome ; & tels ſont ſes deſtins,
Qu’elle ne peut perir que par ſes propres mains.
Coriolan luy-meſme entreprend ſa défence.
Luy-meſme dans ſes murs eſt en pleine aſſurance.
Que crains-je ? dans ce trouble & cet aſſaut confus,
Ne vois-je pas deſia tous mes Tyrans vaincus ?
Ils ſemblent oublier que je ſuis dans leur chaiſne.
Mes Gardes ſont épars… mais qu’eſt-ce qui me geſne ?
D’où vient que malgré moy mon cœur craint leur courroux ?
J’ay mis tout ce que j’aime à couvert de leurs coups
À leurs reſſentimens je reſte ſeule en proye.
Quoy ? lâche, ton peril doit-il troubler ta joye ?
Un ſi foible intereſt merite-t-il ces pleurs,
Qui du vainqueur de Rome ont eſté les vainqueurs ?
Si tu meurs, en mourant tu vois Rome immortelle
À Rome, ainſi qu’à toy Coriolan fidelle.
Mais ſi de tes Tyrans le courroux amorty
Laiſſe… Que vois-je ? Albin, vous n’eſtes point party ?