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DANS LA HAUTE-ÉTHIOPIE

provient de ce qu’il arrive de pays, où la forme des vêtements plus ou moins amples est arrêtée à demeure par l’aiguille et les ciseaux, tandis qu’en Éthiopie, à l’exception de la ceinture et de la culotte, les ajustements divers sont composés de pièces d’étoffes rectangulaires, différentes de dimension seulement et offrant tous les aspects variés que permet la draperie. La confusion qui, à première vue, résulte de ces ajustements, donnerait peut-être la raison de l’embarras des antiquaires et de leur désaccord fréquent, touchant les costumes de l’antiquité grecque et romaine. Je ne sais si je m’abuse, mais mon séjour prolongé au milieu de peuples dont la manière de se vêtir offre des ressemblances frappantes avec celles des Grecs et des Romains, et l’usage que j’ai fait moi-même de leurs vêtements, me donnent à croire que beaucoup de leurs noms signifiaient, non des vêtements différents, mais différentes façons de draper le même vêtement[1].

Au besoin, les Éthiopiens font de leur toge un tapis, une courte-pointe, une tenture ou une portière, comme le rapporte, pour les Grecs, Athénée ; de même qu’Agamemnon, ils s’en servent comme de signal ; elle leur sert à recueillir l’enfant à sa naissance ; ils n’ont d’autre couverture durant leur sommeil et un pan de toge leur sert de linceul, comme il est dit dans Homère et Xénophon. Pour exprimer l’accueil le plus sincère et le plus dévoué, ils ont des expressions qui signifient étendre la toge le long du chemin sous les pas de celui qu’ils veulent honorer, rappelant ainsi les récits évangéliques de l’entrée du Sauveur dans

  1. Voir la note 1 à la fin du volume.