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DOUZE ANS DE SÉJOUR

l’alarme dans le cas d’une irruption du Ras, qui, de son côté, avait réuni à petit bruit près de Dabra-Tabor plus de quatre mille de ses meilleurs cavaliers. Mais ces deux Polémarques essayaient en vain de cacher leurs intentions, elles transparaissaient chaque jour davantage ; la pacification du Dambya s’en ressentait. Les marchés étaient mal pourvus, les caravanes n’osaient s’aventurer, la défiance arrêtait toute transaction, chacun se préparait à de nouveaux troubles.

Quelques favoris du Ras, mécontents de leur position, désertèrent et vinrent chez Birro ; celui-ci leur fit excellent accueil, donna des grades à quelques-uns et obtint du Ras la rentrée en grâce des autres, avec une position plus avantageuse. Aussi, beaucoup de notables d’Ali étaient-ils prêts à passer au service de son adroit vassal. Parmi eux se présenta un cavalier nommé Syoum, destiné à une célébrité précoce. D’une famille noble, mais déchue, Syoum était entré comme page chez le Ras Imam, un des prédécesseurs d’Ali ; une réponse spirituelle le fit remarquer de son maître, qui, avant de mourir, le promut au grade d’échanson pour ses veillées intimes. Le jeune Syoum, devenu bon cavalier et fort lutteur, avait de plus pris cette énergie de caractère commune à tous ceux qui, comme lui, avaient fait leur éducation militaire dans la rude intimité d’Imam. Admis au nombre des compains du Ras Ali, l’ambition le rendit inquiet ; trouvant son avancement trop lent, il venait chez Birro. Celui-ci lui donna l’investiture d’un fief, auquel était attaché le titre de Balambaras ou chef des écuries impériales, et il le revêtit publiquement d’une cotte-d’armes en soie, comme il est d’usage pour ce titulaire.