Le Prince prit place sur son alga, derrière lequel son servant d’armes, appuyé sur la javeline, tenait haut le bouclier de son maître ; ses commensaux, brassard d’honneur au poignet et sabre au côté, se rangèrent debout autour de lui. Le page porte-aiguière s’avança et les Enjerras Assallafis (panetiers), les épaules et les bras nus, s’étant soigneusement lavé les mains[1], s’échelonnèrent des deux côtés de la table et se tinrent debout, les coudes au corps et les avants-bras ouverts. Les huissiers se postèrent aux issues, et chef d’avant-garde, sénéchaux, tous les principaux seigneurs vinrent se placer selon leur naissance et leur rang. Une deuxième file de convives s’assirent de façon à pouvoir encore atteindre la table en allongeant le bras, et derrière, les cavaliers de marque, les fantassins et fusiliers d’élite se tassèrent debout, en rangs pressés et si nombreux qu’ils soulevaient les parois des tentes. Les trompettes de l’Azzage ou biarque annoncèrent son arrivée ; la portière fut relevée et l’Azzage Fanta, revêtu des insignes de sa charge, parut sur la place, conduisant les employés de la bouche. Des hommes tenant sur la tête des paniers de pains de première qualité, recouverts de housses écarlates traînantes jusqu’à terre, ouvraient la marche ; puis deux files de cuisinières et de femmes de service portant des plats et des terrines de ragoûts bien lutées ; ensuite le premier échanson, suivi d’une longue rangée de servantes courbées sous leurs jarres d’hydromel. Pendant ce défilé, les timbaliers au dehors
- ↑ Les Engerras Assallafis ont seuls le droit de mettre la main au plat et en répartissent le contenu.