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DOUZE ANS DE SÉJOUR

avoir défilé devant le Dedjazmatch, ils formèrent en faisceau, en face de lui, leurs perches et fascines ; ils en firent une fois le tour au pas de course et vinrent se ranger sur la droite de notre tertre. Birro Guoscho passa ensuite à la tête de ses gens, parmi lesquels figurait son nouveau vassal, le Dedjadj Baria ; ils tournèrent également autour du faisceau, chaque homme y jetant sa perche ou sa fascine, et ils allèrent se ranger à distance. Hauts dignitaires, seigneurs, chefs de bande, tous les corps de l’armée défilèrent à leur tour, et chacun ayant répété la même manœuvre se rangea de façon à former un cercle immense autour du faisceau, qui avait atteint les proportions d’une grande pyramide. Un prêtre l’ayant béni, on y mit le feu. Les soldats poussèrent de grands cris et les fusiliers firent des décharges, trompettes, timbaliers, joueurs de flûte et de tambourin s’évertuant à accroître le vacarme. Une ronde désordonnée de fantassins et de cavaliers se forma autour du vaste bûcher, tantôt disparaissant dans les nuages de fumée, tantôt se profilant sur les flammes : c’était des soldats qui, dans l’espoir de se rendre l’année propice, couraient trois fois autour du bûcher de la Maskal, rappelant ainsi les péridromes de l’antiquité.

Le Prince monta à cheval et rentra au camp pour le festin.

Plusieurs tentes dressées d’enfilade suffisaient à peine à contenir dans leur longueur son alga et plusieurs tables basses, d’environ un mètre de large, réunies bout à bout. Deux rangées de galettes de pain, artistement empilées le long des deux bords de cette table, laissaient au milieu comme une ruelle d’une coudée de profondeur, prête à recevoir de distance en distance les plats et les terrines.