Page:Abbadie - Douze ans de séjour dans la Haute-Éthiopie.djvu/406

Cette page a été validée par deux contributeurs.
398
DOUZE ANS DE SÉJOUR

Ras. Birro les fit intercepter et battre ; d’autres leur succédèrent ; le Ras ordonna la restitution, mais en vain. Le Dedjadj Guoscho intervint sans plus de succès, et le moment d’entrer en campagne arrivant sur ces entrefaites, Birro partit avec son cheval qu’il nomma Dempto (retentissant).

Si je me suis étendu sur des particularités au sujet de ces deux serviteurs du Fit-worari, Birro Guoscho, c’est que Dempto, si bien assorti avec son maître, devait justifier le nom ambitieux qu’il en avait reçu, et que Tiksa Méred, à cette époque, le principal ouvrier de la fortune de Birro Guoscho, devait en être une des plus éclatantes victimes.

Il se faisait tard ; Birro cuvait encore ses colères, lorsque le soldat qui gardait extérieurement la porte, annonça discrètement un envoyé du Ras. Birro perdit contenance.

— Vite, vite, dit Méred, que Monseigneur se couche sur son alga et fasse le malade !

En même temps, il poussait la braisière auprès de l’alga, et quand son maître fut convenablement étendu, le visage tourné du côté de la muraille, il introduisit le page du Ras en lui recommandant de parler bas. Le message était ainsi conçu : « Comment as-tu passé la soirée ? J’ai envie de revoir ton Dempto ; envoie-le moi donc. Les yeux se rassasient vite de l’objet de nos fantaisies, et si dans quelques jours, tu regrettes encore ton cheval, je verrai à te le rendre. »

Birro, s’attendant à cette demande, avait résolu de s’exposer à tout plutôt que de céder Dempto.

— Va, je te prie, t’incliner de ma part devant Monseigneur, répondit-il à Méred d’une voix affaiblie, et dis-lui que j’espère pouvoir aller demain en