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DANS LA HAUTE-ÉTHIOPIE

tion de bravoure exceptionnelle acquise dans maint combat. Birro l’avait fait Fit-worari de sa petite armée, et bientôt après son conseiller le plus intime. Méred, petit de taille, avait le teint presque aussi clair que celui d’un Européen, la figure maigre, expressive, intelligente, les manières distinguées, l’élocution facile. Affable, subtil, résolu, fécond en expédients et habile à se commander, il réunissait tout ce qu’il fallait pour plaire à son maître, dont il renforçait du reste l’autorité, en lui prêtant l’appui de sa popularité et de sa nombreuse parentelle qui faisaient de lui le notable le plus important de l’Enneussé.

Quant au cheval Dempto, la fortune l’avait tiré de l’obscurité à la même époque et aussi brusquement que son maître. Sa taille était moyenne, sa robe isabelle, ses crins noirs ; bien croupé, goussant, membru, court-jointé, lippu, orillard et fort en bouche, il avait le col long, le front large et de grands yeux intelligents ; sous l’homme il bégayait, s’entablait et dépassait les meilleurs coureurs. Il était cheval de somme, lorsqu’un petit chef du Gojam le vit sous sa charge, devina ses qualités, l’acheta pour un prix insignifiant, l’engraissa et fut contraint de le revendre à un riche seigneur. Celui-ci en fit don, comme d’une merveille, à un ancien polémarque du Gojam qui attendait dans la ville d’asile de Mota en Enneussé que sa fortune se relevât. Birro Guoscho, en prenant possession du gouvernement de l’Enneussé entendit parler de ce cheval, et le propriétaire ayant refusé de le lui vendre, Birro fit naître un prétexte et se l’appropria. Le clergé de l’asile prit fait et cause pour le réfugié et expédia des messagers à Dabra Tabor pour réclamer auprès du