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DANS LA HAUTE-ÉTHIOPIE

charmé ses compatriotes, il se reprenait soudain et leur disait en souriant :

— Bah ! à quoi tout cela mène-t-il, ô mes pauvres Gondariens ? Lorsque, la nuit, les hyènes font silence, et qu’entre deux rêves vous entendez un hôlement lointain, vous vous dites : « Ha ! oui, c’est l’oiseau nocturne qui veille dans les ruines de notre palais impérial. » Et vous ramenez sur votre tête un pan de votre toge, et vous vous rendormez. Je suis comme cette hulotte : je vous rappelle l’édifice écroulé de notre grandeur nationale. Mais à quoi bon ? Fermez les yeux et dites que c’est moi qui rêve.

Cependant ma visite au camp du Dedjadj Guoscho avait été pour moi comme une révélation. L’urbanité, l’esprit chrétien et un je ne sais quoi d’antique et de chevaleresque qui régnait à sa cour, m’avaient fait désirer de la mieux connaître ; je m’étais mis à apprendre l’amarigna, et la campagne que je venais de faire avec l’armée gojamite avait achevé de me déterminer à donner une direction nouvelle à mes études et à remettre à un autre temps mon voyage en Innarya. La géographie du Gojam, du Damote et de l’Agaw-Médir était encore inconnue, il est vrai ; il restait aussi à vérifier le renseignement relatif à ce grand cours d’eau de l’Innarya, renseignement qui avait si fort impressionné mon frère ; mais, depuis son départ, le temps s’était écoulé sans que j’eusse pu exécuter notre programme. Je savais que mon frère ne pouvait tarder à revenir, et qu’il reprendrait avec une compétence bien supérieure à la mienne les travaux géographiques que je venais d’interrompre si brusquement durant notre campagne en Liben. En tous cas, la position exceptionnelle que je devais aux bontés du Dedjadj Guoscho me