La femme du Dedjazmatch envoyait deux, ou trois fois par jour s’informer de mes besoins ; elle manifesta le désir de me recevoir chez elle. Le Prince me fit sonder à ce sujet, mais je crus devoir montrer beaucoup de réserve ; je me rappelais les paroles du Lik Atskou et je voulais, autant que possible, me tenir à l’écart de la vie intime de mes hôtes. Le Prince fit dire à sa femme de ne point insister ; et je n’eus pas lieu de m’apercevoir que mon refus ait causé du dépit à la Waïzoro, qui se préoccupa, comme avant, de pourvoir assidûment à mon bien-être. Elle disait que, me voyant seul, loin de ma mère et de mes sœurs, elle devait, par ses soins, les remplacer auprès de moi et me tenir lieu de famille, parce qu’une femme seulement sait pourvoir avec intelligence aux détails de la vie matérielle. En effet, elle s’imposa cette tâche, dont elle s’acquitta toujours de la façon la plus convenable et la plus délicate.
Un jour, le Dedjazmatch me proposa une chasse au sanglier ; je l’accompagnai, monté sur ma modeste mule. Chemin faisant, il me demanda si dans mon pays on aimait les mules qui vont l’amble ; il en montait une lui-même fort belle. Je répondis qu’en France l’homme de guerre ne montait que le cheval ; qu’on laissait la mule pour le bât. Sans faire attention à ce qu’il pouvait y avoir, dans ma réponse, de peu aimable pour lui, le Prince se contenta de dire :
— Ici, l’on préfère réserver l’ardeur des chevaux pour le moment du combat, et monter des mules pour voyager sûrement dans notre pays montagneux. Mais peut-être ignores-tu ce que c’est qu’une bonne mule.
Il se fit donner la mule d’un de ses suivants et m’offrit la sienne. Elle était si bien dressée que, tout