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DOUZE ANS DE SÉJOUR

Bientôt, le soleil devient incommode ; chacun rentre chez soi pour la grande affaire du déjeuner, et Gondar redevient silencieuse jusqu’à deux ou trois heures de l’après-midi.

Les Éthiopiens observent plusieurs jeûnes longs et rigoureux, indépendamment de celui du mercredi et du vendredi. En temps de jeûne, les offices ne commencent pas avant deux ou trois heures de l’après-midi, et les habitants attendent, pour faire l’unique repas de la journée, que les carillons aient annoncé la communion.

Ne connaissant ni sablier, ni clepsydre, ni horloge d’aucune sorte, ils divisent la journée en six parties qui ont leurs dénominations consacrées, d’après la hauteur du soleil sur l’horizon. Le clergé et les hommes instruits usent d’une chronométrie un peu moins grossière : le dos au soleil, ils mesurent, par semelles et demi-semelles, la longueur de leur ombre. La durée quotidienne de chacun de leurs jeûnes équivaut à tel nombre de semelles et demi-semelles ; quelques-uns se prolongent jusque peu avant le coucher du soleil.

Pendant les longues matinées du mercredi et du vendredi, Gondar présente sa physionomie la plus animée. Les églises restent ouvertes : on y voit, au milieu de désœuvrés et de chercheurs d’aventures, des vieillards, des femmes, des soldats et des clercs faisant leurs méditations, leurs prières ou causant paisiblement à l’ombre des arbres du pourtour. Vers huit heures, les habitants se portent aux divers plaids de l’Atsé, de l’Itchagué, de l’Aboune, du Négadras, du Kantiba ou des prudhommes : les délibérations de quelque importance et les procès étant remis de préférence à ces jours. Comme les maisons n’offrent que