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DANS LA HAUTE-ÉTHIOPIE

pour faire leurs couches ou pour s’abriter avec leurs enfants, pendant que leurs maris sont en expédition ; des femmes divorcées ; des matrones célèbres par leurs aventures, leur beauté passée ou leur esprit ; quelques trafiquants, des moines, des religieuses, des nécessiteux, des soldats mutilés, des rebelles, des voleurs de grande route et des meurtriers ; des gens fuyant la vindicte des lois ou les persécutions ; quelques artisans et même quelques musulmans, car le clergé éthiopien recueille et protége sans distinction dans ses asiles les nationaux, les étrangers ou les ennemis de sa foi.

L’Atsé, dépouillé de tout pouvoir et de toute autorité, vivait abandonné dans l’isolement de son palais ; néanmoins, la salle des plaids, de loin en loin, retentissait de la voix des avocats, qui, grâce à l’empire des us et coutumes, venaient plaider en dernier appel quelques procès d’une nature spéciale, devant l’antique tribunal suprême, présidé par l’Atsé, et composé comme on sait des quatre Likaontes et de leurs quatre Azzages, auxquels s’adjoignaient dans certaines occasions quelques prudhommes de la ville.

L’Itchagué, chef révocable du clergé régulier, était nommé par le Ras Ali, sur la présentation du clergé ; sa juridiction attirait à Gondar des abbés et des moines des provinces éloignées, ainsi que beaucoup de membres du clergé séculier. Toutes les causes civiles qui prenaient origine dans son quartier ressortissaient également de sa juridiction ; quant aux causes criminelles, instruction faite, il les renvoyait en cour du Ras.

L’Aboune partageait avec l’Itchagué la juridiction sur le clergé séculier, et exerçait également le droit de basse justice sur les habitants de son quartier.

Le Négadras (tête des trafiquants), chef de la gabelle,