Dès le début des guerres civiles, la noblesse et les paysans avaient uni leurs intérêts ; le clergé leur était acquis, et les communes s’étaient réveillées de leur léthargie ; la noblesse combattit pour elles, et les paysans soutinrent leurs seigneurs, lorsque ceux-ci opposaient quelque résistance aux volontés des Dedjazmatchs. La féodalité reprit de la force de l’union sincère de ses deux éléments essentiels.
Afin de mieux réduire ses sujets, Gouksa s’appliqua, comme les Empereurs, à désunir les paysans et les nobles ; mais il s’y prit en sens inverse. Les Empereurs avaient rendu la noblesse insolente en favorisant son luxe et ses empiétements sur les communes ; à l’exemple d’Ali-le-Grand, Gouksa affecta au contraire une simplicité égalitaire et une rusticité de mœurs, qui flattaient le peuple et provoquaient les dédains de la noblesse. Au lieu d’employer les sommes provenant des impôts à augmenter le luxe de sa cour, il les entassait dans ses monts-forts. Il aviva les rivalités entre les chefs des grandes familles, afin de se ménager des prétextes de les réprimer et de réduire leurs prérogatives. Il tint le clergé à l’écart des affaires, usa envers lui de formes respectueuses, mais ne laissa échapper aucune occasion de discréditer ses principaux membres par une indulgence dédaigneuse. Lorsqu’il crut avoir gagné le peuple, il résolut de déposséder ouvertement la noblesse et inaugura cette politique par un ban resté célèbre, qui a fait donner à la dynastie de Gouangoul et d’Ali-le-Grand le nom de dynastie de Gouksa. Ce ban était ainsi conçu :
« Entends, pays, entends, entends ! Que l’épée décide contre les ennemis de notre maître ! La terre est à Dieu ; l’homme n’en saurait être qu’usu-