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DANS LA HAUTE-ÉTHIOPIE

l’aristocratie, du clergé, quelquefois du peuple, et plus souvent par les excès des prétentions impériales. Selon les traditionnistes, quelques portions de l’Empire auraient essayé d’autres formes de gouvernement, mais toujours entées sur leurs formes féodales. Ils auraient, tour à tour, érigé des royautés, des oligarchies, et, désespérant de le trouver sur la terre, ils auraient été chercher dans le ciel le gardien suprême de leurs intérêts ici-bas, en nommant tel saint ou tel archange comme chef inspirateur de tous les pouvoirs. Mais quelles qu’aient été ces tentatives, de quelque côté que ce peuple se soit retourné sur son lit de douleur social, il n’aurait jamais abandonné l’ordonnance féodale proprement dite.

Du reste, le mot de féodalité est un de ceux dont la portée a changé suivant les temps et les lieux où il a été appliqué. On a cherché à préciser le pays où cette forme de gouvernement a surgi la première fois. Serait-ce en Europe, des suites d’une conquête ? Serait-ce en Perse ou dans l’Inde, d’où elle nous aurait été importée ? Ou bien, la devons-nous à nos premiers ancêtres, les Ariens ? En tous cas, en Orient, la féodalité a toujours existé en germe dans l’état patriarcal, où elle s’est développée diversement, selon le temps, le lieu ou les événements. Son éclosion est naturelle chez les peuples pasteurs, et surtout chez les peuples agricoles, qui n’ont pas été déformés par le despotisme, qu’ils aient à contenir un peuple conquis, ou que les intérêts de leur propre défense contre les dangers de l’intérieur ou de l’extérieur leur fassent sentir l’insuffisance de leur organisation par familles indépendantes.

Lorsque des pères ou chefs de famille, ces pre-