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Agnès. — Sans doute qu’il aurait conduit Virginie dans ce pays, s’ils fussent venus à bout de leurs desseins. Hélas ! qu’il y aurait peu de reclus et de recluses, si on donnait le temps à ceux et à celles qui entrent dans le cloître de réfléchir sur les avantages d’une honnête liberté et sur les suites fâcheuses d’un funeste engagement !

Angélique. — Pourquoi parles-tu de la sorte ? Ne pouvons-nous pas goûter des plaisirs aussi parfaits dans l’enceinte de nos murailles, comme ceux qui sont au dehors ? Les obstacles qui s’y opposent ne servent qu’à les rendre de meilleur goût, quand, après les avoir adroitement surmontés, nous possédons ce que nous avons désiré. Ce serait être malin et ingrat, que de censurer les divertissements des moines et moinesses, car je dirais à ces gens-là : N’est-il pas vrai que la continence est un don de Dieu, duquel il gratifie qui il lui plaît, et dont il ne fait pas largesse à ceux qu’il n’en veut pas honorer ? Cela supposé, il ne fera rendre compte de ce présent qu’à ceux à qui il l’aura donné.

Agnès. — Je conçois bien la force de cette raison ; mais on pourrait dire que les vœux par lesquels nous nous y engageons solennellement nous en rendent responsables devant lui

Angélique. — Eh ! ne vois-tu pas bien que ces vœux-là, que tu fais entre les mains des hommes, ne sont que des chansons ? Peux-tu avec raison l’obliger à donner ce que tu n’as pas et ce que tu