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billet qu’une lettre, car le tout n’est composé que de cinq ou six lignes.

Agnès. — Son caractère n’est guère diffèrent du mien :

Ah ! que vous êtes artificieux dans vos paroles et que vous savez bien troubler le peu de repos qui reste à une innocente qui vous aime ! Pouvez-vous avec raison me demander si je pense à vous ? Hélas ! mon cher, consultez-vous vous-même, et croyez que nous ne pouvons tous deux être animés d’une même passion, sans ressentir de pareilles atteintes. Adieu ; songez à la rupture de nos chaînes : l’amour me rend capable de toute entreprise. Ah ! qu’il me cause de faiblesse ! Adieu.

Angélique. — N’est-il pas vrai que tu trouves ce billet bien plus tendre que la lettre ?

Agnès. — Assurément ; on peut dire qu’il est tout cœur, et que deux ou trois périodes expriment autant la disposition de l’âme d’une amante que le feraient deux pages d’un roman. Mais je ne vois pas que ce soit une réponse à celle que nous avons lue du Père de Raucourt.

Angélique. — Non, ce n’en est pas une ; c’est celle d’une autre qu’on ne m’a pas envoyée.

Agnès. — Le malheur de ces deux pauvres amants me touche ; surtout je porte une extrême compassion aux déplaisirs de Virginie ; car sans doute elle passe le temps à présent dans beaucoup de chagrin, et mène une vie bien ennuyeuse.