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serraient étroitement la main, et, se regardant avec langueur, ils se disaient quelques mots de tendresse qui partaient plus de leur cœur que de leur bouche. Cette amoureuse contemplation fut suivie de l’ouverture d’une petite fenêtre carrée, qui était vers le milieu de la grille, et qui servait à passer les paquets un peu gros dont on faisait présent aux religieuses. Ce fut pour lors que Virginie reçut et donna mille baisers, mais avec des transports si grands, avec des saillies si surprenantes, que l’amour même n’aurait pas pu en augmenter l’ardeur. Ah ! ma chère Virginie, commença notre passionné, vous voulus donc que nous en demeurions là ? Hélas ! que vous avez peu de retour pour ceux qui vous aiment, et que vous savez bien pratiquer l’art de les tourmenter ! — En quoi, reprit notre vestale, puis-je encore vous faire présent de quelque chose, après vous avoir donné mon cœur ? Ah ! que votre amour est tyrannique ! Je sais ce que vous désirez ; je sais même que j’ai eu la faiblesse de vous le faire espérer ; mais je n’ignore pas que c’est tout mon bien et toute ma richesse, et que je ne puis vous l’accorder qu’en me réduisant à l’extrémité. Ne pouvons-nous pas, en demeurant dans les termes où nous sommes, passer ensemble de doux moments, et goûter des plaisirs d’autant plus parfaits qu’ils seront purs et innocents ? Si votre bonheur, comme vous me dites, ne dépend que de la perte de ce que j’ai de plus cher, vous ne pouvez être heu-