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personne. Je n’avais aucun penchant pour la religion ; je combattais vivement les raisons de ceux qui m’y portaient, et jamais je n’y serais entrée, si un jésuite, qui pour lors gouvernait ce monastère, ne s’en était mêlé : un intérêt de famille obligea ma mère, qui m’aimait tendrement, et qui s’y était toujours opposée, à y donner les mains. J’y résistai longtemps parce que je ne prévoyais pas que le comte de la Roche, mon frère aîné, par le droit de noblesse et par les coutumes du pays, emportait presque tout le bien de la maison, et nous laissait six, sans autre appui que celui qu’il nous promettait, qui selon son humeur devait être peu de chose. Enfin il céda dix mille francs, à ce qu’il me dit, de ses prétentions, auxquels quatre furent ajoutés, tellement que j’apportai quatorze mille livres pour ma dot, en faisant profession dans ce couvent. Mais pour revenir à l’adresse de celui qui m’embaucha, tu sauras qu’on fit en sorte que je me rencontrasse avec lui, une après-dînée que j’étais allée rendre visite à une de mes cousines qui était religieuse, et qui mourait d’envie de me voir revêtue d’un habit semblable au sien.

Agnès. — N’était-ce pas sœur Victorie ?

Angélique. — Oui. Nous étant donc trouvés tous trois à un même parloir, le jésuite, Victorie et moi, nous commençâmes par les compliments et les civilités dont on use dans les premières entrevues ; elles furent suivies d’un discours de ce loyaliste touchant les vanités du siècle, et la difficulté