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de se laisser conduire à cette nature pure et innocente, en suivant uniquement les inclinations qu’elle nous donne ; mais l’honneur et l’ambition, qui sont venus troubler le repos des cloîtres, obligent celles qui y sont entrées à se partager, et à faire souvent par prudence ce qu’elles ne peuvent faire par inclination.

Agnès. — C’est-à-dire qu’une infinité qui croient être maîtresses de votre cœur n’en possèdent seulement que la peinture, et que toutes vos protestations les assurent souvent d’un bien dont elles ne jouissent pas en effet. Je craindrais fort, je vous l’avoue, d’être de ce nombre, et d’être une victime de votre politique.

Angélique. — Ah ! ma chère, tu me fais une injure ; la dissimulation n’a point de part à des amitiés aussi fortes que la nôtre. Je suis toute à toi ; et quand la nature m’aurait fait naître d’un même sang, elle ne m’aurait pas donné des sentiments plus tendres que ceux que je ressens. Permets que je t’embrasse, afin que nos cœurs se parlent l’un à l’autre au milieu de nos baisers.

Agnès. — Ah Dieu ! comme tu me serres entre tes bras ! Songes-tu que je suis nue, en chemise ? Ah ! tu me mets toute en feu !

Angélique. — Ah ! que ce vermeil, dont tu es à présent animée, augmente l’éclat de ta beauté ! Ah ! que ce feu, qui brille maintenant dans tes yeux, te rend aimable ! Faut-il qu’une fille aussi accomplie que toi soit si retirée comme tu es ?