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ments et à nos plaisirs. En effet, dépôts que nous sommes heureusement revenues de nos préjugés et guéries de nos illusions, n’a-t-elle pas toujours été notre seul guide dans la belle route des ris, des jeux, des grâces et des amours ? Combien de lois ne m’as-tu pas démontré que les lois humaines, hérissées comme elles le sont, ne sont que des toiles d’araignées pour les esprits forts, tandis qu’elles sont, pour les petits esprits, des fers qu’ils ne sauraient briser et des chaînes dont ils ne peuvent s’affranchir ?

Il y a pourtant, ma sœur, quelque chose à redire à tout cela, et je me trompe fort si tu ne vas être bien étonnée d’entendre ta petite écolière dogmatiser devant une fille autant habile que tu l’es. L’expérience, qui est une grande maîtresse, m’enseigne que, quand l’amour-propre entend bien ses véritables intérêts, il excelle dans l’art de perpétuer les plaisirs et d’y trouver du raffinement par une sage modération et par une prudente économie. Que si la jouissance produit si souvent le dégoût, celle qui est outrée le doit produire avec beaucoup plus de raison ; que c’est sur ce principe-là que l’on dit communément, et qu’on ne l’éprouve que trop, que le mariage est le tombeau de l’amour ; que lorsque tout est fait, tout est dit ; et que c’est apparemment par une bonne conséquence de ce principe que l’on nomme parmi nous ce que tu sais bien, les dernières faveurs, qui, pour notre malheur, ne sont pas seulement