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particularités, ou bien tu as toujours été en sa compagnie ?

Angélique. — Elle-même m’en a fait confidence, et m’a conté jusques aux moindres paroles ; outre cela, je me suis trouvée beaucoup plus de fois avec elle, et ai été témoin de diverses choses qui lui sont arrivées.

Agnès. — Il faut avouer, Angélique, que tu as eu bien du plaisir. Tu dois être fort satisfaite.

Angélique. — Tu as raison ; il n’y a que cette coutume de divertissement qui réjouisse les personnes. Si les vérités que je t’ai racontées étaient connues d’une infinité de scrupuleuses, elles renonceraient bientôt à leurs sottes opinions, et, examinant à la règle d’une droite raison les nécessités naturelles, elles trouveraient dans la vie bien plus de douceur qu’elles n’en éprouvent. Pour vivre heureuses dans ce monde, nous devons ôter toutes les préventions de notre esprit, en excommunier tout ce que la tyrannie d’une mauvaise coutume peut y avoir imprimé, et conformer ensuite notre vie à ce que la nature toute pure et innocente demande de nous.

Agnès. — Je te suis bien obligée, Angélique, puisque sans toi je serais encore dans l’aveuglement et dans l’innocence ; car l’effort de mes premières connaissances, la violence des mauvaises habitudes, et le torrent de la multitude m’auraient sans doute emportée, si les solides instructions que