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la nature lui permet de chercher quelque objet qui l’occupe, et de s’attacher à ceux pour qui on a de l’amitié.

Angélique. — J’ai vu néanmoins des personnes qui condamnaient cette liberté-là comme un grand crime.

Agnès. — Je le crois bien : il est vrai que les lois civiles sont contraires en cela à celles de la nature, mais c’est seulement pour éviter les désordres qui pourraient arriver dans le monde.

Il est vrai que, dans le commerce d’amour, il faut éviter l’éclat ; autrement ce serait faire une imprudence extrême de se divulguer si hautement. L’on peut faire l’hypocrite, faire quelques grimaces en temps et lieu, ne parler que fort peu et même ne pas témoigner trop de passion pour la personne qu’on aime, et prendre à propos l’heure du berger. Voilà les moyens dont se servent aussi celles qui veulent vivre heureuses dans la servitude du mariage, en cachant le mystère de leur cœur, et pour planter à leurs maris des cornes en abondance, sans que les pauvres maris s’en aperçoivent. C’est ainsi qu’il se faut gouverner de part et d’autre, tant les vierges que les femmes.

Angélique. — Vous me surprenez, Agnès, par cette facilité que vous avez pour tromper un homme, si vous en aviez ; vous en parlez aussi authentiquement comme si vous l’aviez déjà expérimenté. Toute votre morale ne me détournera pas de cette manière avec Samuel, ni même avec un