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que je te dise ma pensée ? Je crois qu’ils n’en sauraient trop savoir, mais qu’ils en pourraient moins pratiquer ; car il est certain qu’ayant la direction des âmes. Ils doivent avoir une parfaite connaissance tant du bien que du mal, pour en faire un juste discernement, et pour nous exhorter avec force à la poursuite et à l’amour de l’un, et nous prêcher avec un même zèle la fuite et la haine de l’autre. Mais ils ne font rien moins que cela, et les mauvais livres où ils puisent leur lumière corrompent aussi bien leur volonté qu’ils éclairent leur entendement.

Agnès. — Je crois que tu abuses des termes, et que tu ne penses pas que parmi les savants il n’y a point de livre qui, de sa nature, porte le titre de défendu, et que le seul usage que nous en faisons lui donne la qualité de bon, de mauvais ou d’indifférent.

Angélique. — Ah Dieu ! je crois que tu rêves de parler de la sorte, et tu dois convenir avec moi qu’il y a de certains livres dont toutes les parties ne valent rien et dont les instructions sont essentiellement opposées à la bonne morale et à la pratique de la vertu. Que peux-tu dire de l’École des filles et de cette infâme philosophie qui n’a rien que de fade et d’insipide, et dont les forts raisonnements ne peuvent persuader que les âmes basses et vulgaires, ni toucher que celles qui sont à demi corrompues, ou qui, d’elles-mêmes, se laissent aller à toutes sortes de faiblesses ?