conter par le menu dix ou douze bonnes aventures qui vont nous mener tout doucement jusqu’à l’heure du souper. Asseyez-vous là, mon compère.
— Mon bon frère, répliqua Gillot, je veux bien m’asseoir, car je me plais singulièrement en votre compagnie, mais j’écouterai une autre fois vos aventures. Aujourd’hui occupons-nous des ordres de mon maître.
— À votre volonté, mon ami : Dieu merci, je n’aime pas beaucoup raconter des histoires. Où en étions-nous ? à l’âge de l’enfant que vous vouliez connaître. Eh bien ! l’enfant qui s’appelle Aubry, comme son père, peut avoir dix-sept ans et demi.
— C’est trop jeune.
— Il s’agit donc d’une bien importante besogne !
— Une affaire d’État.
— Aïe ! mon compère ! s’écria le moine ; une affaire d’État menée par le Dain le barbier ! ça doit être noir comme sac à charbon ! Je ne suis pas encore descendu plus bas que l’église depuis l’arrivée du roi de France au monastère, car mes pauvres jambes n’en veulent plus, mais j’ai ouï dire que cet Olivier le Dain était l’âme damnée de son maître.
— Si vous connaissiez le roi, mon bon frère… commença Pierre Gillot.
— Je le connais de renommée, mon compère.
— Écoutez, interrompit Gillot ; le prieur m’a affirmé que vous étiez un homme de grand sens et de bon conseil…
C’est donc pour me tenir en humilité chrétienne que le prieur me dit toujours à moi que je suis un vieux fou !
— Le temps me presse et mon maître m’attend. Avec vous je ne veux pas aller par quatre chemins ; je suis venu parce que je sais que vous avez d’anciennes relations d’amitié avec ce Jeannin dont vous avez prononcé le nom.
— Jeannin des Quatre-Salines ?
— Jeannin l’homme d’armes, qui sera chevalier demain, si vous voulez.
— Merci Dieu ! s’écria le moine, si je le veux ! Jeannin est la