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cours de Mathieu Dumas sur la nécessité de rétablir la Garde nationale (1).

Elle écrivit un plaidoyer pour la défense de Marie-Antoinette, et son salon ne convenait ni aux Montagnards, ni aux simples républicains, parce qu’elle n’était pas républicaine elle-même, parce qu’elle se rallia, plus tard, seulement à la cause de la République régulière. Legendre, à la Convention, donnait à entendre que madame de Staël était « la plus grande protectrice des émigrés. » ... « Il n’est pas un membre de cette assemblée qui n’ait reçu des invitations fréquentes d’aller chez cette femme dont je me méfie ; j’en ai reçu moi-même, ainsi que mon collègue Dumont et plusieurs autres. » Marchenna, qui fréquentait ce salon, rédigeait rAmi des lois^ journal réactionnaire. Il demandait, dans des affiches, le rappel des émigrés. On le reconduisit, de brigade en brigade, jusqu’à la frontière espagnole.

Chez madame de Staël, nombre d’invités préparèrent le 18 fructidor ; cependant, il ne paraît pas qu’ils y conspirassent ouvertement. D’ailleurs, madame de Staël se défendit d’avoir pris part à la journée du 18 fructidor. Son salon seul fut coupable. Devaines, parlant d’elle, dit :

« C’est une excellente femme, qui noierait tous ses amis, pour avoir le plaisir de les péchera la ligne (2). » « Le Directoire, imprima le Journal de Paris^ a franchement et simplement déclaré, dans une proclamation affichée hier, que la conspiration du 18 fructidor est l’ouvrage des anarchistes. Le rapport du ministre de la police le constate complètement (I^j. » Malgré les protestations de madame de Staël, malgré la proclamation directoriale, la journée du 18 fructidor passa pour avoir été en partie l’œuvre des opposants qui fréquentaient le salon de la fille de Necker.

Dans tous les cas, si madame de Staël ne pactisa pas avec les royalistes, elle ne s’accorda pas non plus avec les fauteurs du 18 brumaire, tels que Sieyès et Talleyrand. Celui-ci, en 1796, avait été, grâce à elle, rayé de la liste des émigrés et poussé au ministère des relations extérieures. Ni l’un ni l’autre ne lui gardèrent de la reconnaissance, même de la sympathie, quand leurs ambitions furent de plus en plus excitées.

(1) Souvenirs, t. III, p. 109 et 110.

(2) Sophie Gay, Salons célèbres, p. 7. Paris, 1864. (3) Journal de Paris, numéro du 1" septembre 1796 (15 fructidor an V).