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rempli, tous les soirs, de jolies femmes, d’incroyables, de gens de lettres, de vaudevillistes, de journalistes. C’était un arsenal d’où sortaient, dit Merle, les traits décochés au gouvernement. Plus tard, ou y combla d’éloges le premier consul.

Les « jeunes gens à lunettes » gardaient les boulevards, chassaient les Jacobins des jardins publics, frappaient « les têtes rondes à la Brutus » dans le jardin du Palais-Royal.

A en croire Lacretelle, « quinze ou vingt d’entre eux, et c’étaient les plus accrédités dans l’opinion, se réunissaient habituellement. Rien n’était plus gai, plus ouvert ni plus franc, que les délibérations de ces jeunes monarchistes... Ils préparaient les suffrages pour les comices nouveaux : aussi se voyaient-ils sollicités et flattés par les plus illustres candidats. » {Histoire du Directoire.) Il était de bon ton d’affecter des sentiments monarchiques, de faire de l’opposition aux gouvernants.

Sous le Directoire, le boulevard de Coblentz ;des Italiens) (1) était une sorte de promenade-club contre-révolutionnaire, un club des honnêtes gens, disaient les réacteurs, un monde royaliste boudant et narguant la République. Les promeneurs se reconnaissaient en tirant de la poche de leur gilet un talisman de plomb ou de bois, formant en silhouette les figures de Louis XVI et de Marie-Antoinette, ou par dix-huit boutons à leur habit carré (Louis XVIII), ou à un bouton sur l’épaule. Ils fredonnaient le Réveil du peuple. Les femmes avaient des éventails symboliques, laissant voir Louis XVI, la reine et le dauphin.

11 existait une opposition vive, mais presque impalpable. On vendait les Almanachs des émigrants, de Coblentz, des Aristocrates, de Vabbê Maury, pour 1796, chez tous les libraires royalistes, « des vrais royalistes ».

Au Palais-Royal,, les royalistes ou Jacobins blancs parlaient mystérieusement de leurs espérances monarchiques, du prochain écrasement des derniers républicains.

Appuyons ici sur le royalisme d’un grand nombre de Clichyens. Citons Mathieu Dumas :

Avant fructidor, « quelques membres influents du Conseil des Cinq-Cents formèrent une réunion dans l’ancienne maison de M. Berlin (1) Le nom de boulevard de Coblentz fut donné par les royalistes à la partie méridionale du boulevard des Italiens, s’étendant de la rue Grange-Batelière à celle de la Chaussée-d’Antin, pour rappeler la ville de Coblentz, où se tenaient une foule d’émigrés.