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LA BELLE ALSACIENNE


ménagea plus rien pour tâcher de me fléchir. Il crut que le plus sûr moyen de m’exciter à la compassion était de me découvrir toute l’étendue des maux que je lui faisais souffrir, persuadé que cette vue m’attendrirait en sa faveur.

Dans toute autre circonstance, je n’aurais pas certainement pu tenir contre les traits d’une éloquence si persuasive. Ce spectacle me toucha ; je me sentis émue ; mais plus il excitait ma pitié, moins je croyais devoir y céder. Il paraissait attendre avec une impatience mêlée de crainte le résultat de mes réflexions.

Tout me parlait en sa faveur : sa jeunesse, les grâces naïves d’une figure embellie par la seule nature, sa timidité, son ignorance même qui, par l’embarras où elle le mettait, donnait à ses empressements une expression d’autant plus piquante que je n’y voyais que la vérité du sentiment. Ajoutez à des motifs si puissants ma propre faiblesse et la cruelle abstinence dont mon cœur gémissait depuis quelques jours ; que de raisons pour me