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LA BELLE ALSACIENNE

Ce n’était pas, comme on peut se le figurer, quelque chose de fort amusant pour moi qu’un pareil tête-à-tête. Je n’étais pas malheureusement dans des dispositions qui me permissent d’en faire usage. Le ressouvenir de l’accident du marquis s’opposait à ma bonne volonté. J’étais forcée de me rendre justice ; mon cœur, pénétré du sentiment de son infirmité, gémissait de la nécessité qui le contraignait de s’interdire des douceurs dont l’amorce enchanteresse n’eût servi qu’à prolonger son infortune. Un état si violent commençait à m’impatienter. J’avais beau donner la torture à mon imagination, je ne trouvais pas d’expédient qui pût remplacer ce qui me manquait par quelque équivalent raisonnable.

Je rêvais assez tristement ; ce jeune homme, que mon air mélancolique n’enhardissait pas, était retombé dans ses premières transes. Effrayé de se trouver seul avec moi, il ne savait quelle contenance affecter.

Il se promenait à grands pas dans ma