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LA BELLE ALSACIENNE


nables. On nous fit mettre à table. La joie et les plaisirs régnaient sur les visages de tous les convives ; à la réserve de nos amants disgraciés, qui ne pouvaient digérer facilement la honte d’avoir été interrompus dans leurs tendres ébats.

— Allons, mon ami…, quelque chose de toi, je t’en prie.

Le petit bonhomme qui, dans ce moment, ne se trouvait pas disposé à faire ce qu’on exigeait de lui, s’excusa sur un rhume qui tenait sa voix en échec.

— Je ne suis pas dupe de ton incommodité, reprit le comte ; ce faux-fuyant est le subterfuge ordinaire des musiciens. Vous êtes un peu quinteux, messieurs les choristes du premier ordre, mais vous n’êtes pas ici à l’Opéra, et j’espère que vous ne nous refuserez pas la grâce que nous vous conjurons de nous accorder. Allons, chanteur, chantez, ou retirez-vous.

L’air doux et aigre dont le comte assaisonna ses instances causa un peu d’émotion au musicien. Il pâlit et rougit presque dans le même instant. Il paraissait indécis