Page:A. Belot - Les Stations de l’Amour.djvu/62

Cette page a été validée par deux contributeurs.

femmes, mais jamais, je te le jure, jamais je n’ai ressenti pour personne un sentiment pareil à celui que j’éprouve pour vous… pour toi. Je ne sais comment définir cette sorte d’amour… : cela tient de l’amour charnel le plus intense et de l’amour maternel, car vous êtes parfois une grande enfant, ma chérie, et aussi de l’amour filial. Vous êtes pour moi bonne comme une mère… je sens que vous êtes ma vie même… J’aimerai Gérard, j’aimerai Léo s’il veut de moi… je me donnerai à qui tu voudras, si cela peut augmenter tes plaisirs, mais s’il fallait désormais vivre sans toi, si tu ne m’aimais plus, si tu me renvoyais… j’obéirais, je m’en irais, mais avant trois mois je serais morte…

Je l’écoutais ravie. Accroupie devant moi, elle levait ses beaux yeux voilés de larmes, et le tremblement de sa voix me faisait vibrer délicieusement.

— Écoute-moi à ton tour, Thérèse. Je te crois et j’accepte le don de ta vie comme je te donne de la mienne ce qui m’en appartient. Tu es ma sœur, mon amante, ma femme… nous ne nous quitterons jamais… nous sommes liées l’une à l’autre… Et ne crains rien, je suis sûre que Léo m’approuvera et qu’il nous aimera toutes deux de la même affection.

Je mis sur son front un baiser chaste, presque fraternel, et nous nous quittâmes…

. . . . . . . . . . . . . .

… Hier jeudi, je suis allée voir ma jeune sœur à sa pension ; elle m’a demandé de la faire sortir pendant les vacances du jour de l’an : bien entendu j’y ai consenti, quoique cela doive me gêner dans mes relations avec Thérèse, car je la ferai coucher dans la chambre de Thérèse et j’installerai celle-ci dans ton cabinet de travail. D’ailleurs, quelques jours de repos me feront du bien. Elle devient extrêmement jolie, ma petite Valentine… plus jolie que moi, et bien développée. Sais-tu qu’elle vient d’avoir dix-sept ans ?… c’est une petite femme ; je crois qu’il faudra bientôt songer

— 60 —