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XVI

Pacy-sur-Isère, 27 février 18…

Thérèse à Monsieur Léo Fonteney.

Cher Monsieur,

Madame Fonteney m’avait fait promettre, avant notre séparation, de vous écrire. C’est donc à ma chère maîtresse qu’il faut vous en prendre de ma hardiesse si elle vous offense, et ne pas m’en vouloir d’une audace que je n’aurais jamais eue moi-même.

Mais ceci dit, je sens qu’il faut maintenant que je vous demande pardon de ce que je viens d’écrire, qui paraît mettre en doute votre bonté et votre indulgence naturelles : je puis avouer que je les connais bien et que je connais de même tout ce qui se rapporte à vous ; Cécile (non, je ne pourrai jamais m’habituer à l’appeler Madame en vous parlant d’elle) Cécile m’a fait lire, de vos lettres, tout ce qui me concerne et même davantage. Elle vous a dit qu’elle m’avait confié tous ces secrets avec un abandon qui, plus que tout le reste, m’a attaché à elle et à vous pour la vie, et que je trahirai d’autant moins qu’il me semble que je suis votre complice. Elle m’a dit qu’après quelques temps d’une défiance que je comprends très bien (si bien même que j’aurais été vivement froissée si elle n’eût pas existé, car elle aurait été la marque d’une trop grande indifférence pour ce que faisait votre chère femme pendant votre absence), vous aviez approuvé entièrement la liaison qui s’était établie entre nous et que vous acceptiez le don que je vous ai fait de mon cœur à tous deux. Laissez-moi donc vous l’ouvrir, comme je voudrais vous ouvrir mes bras.

Vous ne sauriez croire, mon cher Léo, avec quelle impa-

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