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touché de repentir, croie donc que c’est sans réserve que Jésus se donne à lui. Pour moi, j’aurai présents ces prodiges, afin que Satan n’ait sur moi aucun empire, car rien ne dissipe aussi promptement les attaques emportées du péché.

« Je nourris mes pensées de ces merveilles d’amour, et je m’écrie : hélas ! hélas ! ô doux Jésus ! Je soupire, car je sens mon cœur sans amour, et cependant je voudrais le voir enchaîné des liens de votre loi, comme vous le fûtes vous-même des liens de la charité.

« Oh ! quel piége cette charité vous tendit, lorsqu’elle vous pressa de mourir pour l’homme ! Mais une proie délicieuse en dérobait l’amertume : les âmes arrachées à l’enfer au prix de votre mort, tel était l’appât qui s’offrait à vos yeux.

« Sans doute, votre regard avait pénétré les peines ainsi cachées, mais leur violence vous laissait sans effroi, ou plutôt, vous trouviez du bonheur à les embrasser sans détour ; l’appât qu’on vous offrait ravissait tendrement votre cœur.

« Ainsi, pour moi, infortunée, l’objet de votre amour, vous avez, de plein gré, heurté l’aiguillon de la mort, alors que vous vous offrîtes, victime pure et sans tache, à votre Père, et que vous lavâtes dans votre sang les souillures qui me déshonoraient.

« Qui donc pourra s’étonner si, à cause de vous, je me répands en soupirs, puisque, sans mérite aucun de ma part, je me trouve unie à un époux si jaloux de ma félicité ? Oui ! vous allumez mon amour d’une