Page:Œuvres politiques de Machiavel.djvu/610

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prince rassurera en même temps sa puissance et la tranquillité universelle. » Quel sera le modèle de ces institutions ? Machiavel le cite dans la même page, c’est la monarchie française entourée de ses mille lois. Napoléon relève donc l’ancienne monarchie. Ainsi il combat le royalisme par les lois de la révolution ; il combat la révolution par la forme de la monarchie, et cette quasi-royauté, avec de nouveaux noms, de nouveaux hommes et une aristocratie nouvelle, s’appelle l’empire. Qu’arrivera-t-il au premier échec ? Laissons parler Machiavel : « Il a contre lui l’ancien ordre de choses ; les hommes « intéressés au nouvel ordre le défendront avec tiédeur, car ils croient peu aux choses nouvelles, et ils redoutent chez les adversaires l’autorité de l’ancienne loi. Ses ennemis extérieurs l’attaqueront donc par une guerre de partisans (partigianamente) ; il sera défendu sans zèle par ses amis, et ils courront le plus « grand danger avec lui[1]. » Donc, avec le désastre de la Russie, les traités sont déchirés, les parentés royales ne retiennent personne, la coalition est universelle. En même temps la guerre de partisans éclate partout dans les provinces conquises ; c’est une guerre républicaine et monarchique, démocratique et royaliste contre l’homme qui n’est ni républicain ni tyran. . . . . . . La guerre, la sédition, sont avant tout monarchiques ; elles gagnent la France où le bonapartisme est faible, intimidé, à moitié rebelle. Il reste une armée nationale, la seule force qui soit consacrée par l’audace de Napoléon et par la théorie de Machiavel, et une fois cette armée écrasée à Waterloo, Napoléon disparait de la scène politique, comme la gironde, comme Danton, comme Robespierre. Quel est donc le maître absolu, le prince abstrait auquel on sacrifie de si grandes victimes ? c’est la révolution : toutes les fois qu’un instrument est devenu odieux, elle le brise d’après le précepte de Machiavel, pour que les peuples restent stupéfiés et satisfaits (stupidi e soddisfatti).



fin de l'appendice


  1. Prince, ch. 6.