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résulter ; il ne se laisse point éclairer par les exemples du passé, que j’ai cités tant sur cet objet que sur ceux que j’ai déjà traités : s’il les prenait pour règle de conduite, il verrait que plus on montre de modération envers ses voisins, moins on manifeste le désir de les subjuguer, plus on les engage à se jeter sans restriction entre vos bras, comme je le ferai voir ci-après par l’exemple des habitants de Capoue.



CHAPITRE XXI.


Le premier préteur que, quatre cents ans après avoir commencé à faire la guerre, les Romains établirent hors de Rome, fut celui qu’ils envoyèrent y Capoue.


J’ai assez longuement établi, dans le chapitre précédent, jusqu’à quel point les Romains, dans la conduite qu’ils tenaient pour s’agrandir, différèrent des souverains qui de nos jours cherchent à accroître leur domination. Ils laissaient vivre sous leurs propres lois les villes qu’ils ne détruisaient pas, même celles qui se soumettaient à eux, non comme alliées, mais comme sujettes ; ils ne laissaient apercevoir chez elles aucun signe qui pût y rappeler la souveraineté du peuple romain ; ils leur imposaient seulement quelques conditions ; et tant que ces conditions étaient observées, ils respectaient et leur gouvernement et leur dignité. On sait qu’ils maintinrent ces principes jusqu’au moment où ils se répandirent hors de l’Italie, et où ils commencèrent à réduire les royaumes et les républiques en provinces romaines.

Un des exemples les plus frappants que nous offre à ce sujet leur histoire, c’est que le premier préteur qu’ils établirent hors de Rome fut celui qu’ils envoyèrent à Capoue, non pour satisfaire leur ambition, mais à la