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porter lorsque le roi de France Louis XII vint en Italie pour attaquer Lodovico, duc de Milan. Le roi, au milieu des préparatifs de son invasion, rechercha l’alliance des Florentins : leurs ambassadeurs, qui se trouvaient auprès de sa personne, convinrent avec lui de demeurer neutres, à condition que si le roi passait en Italie, il leur conserverait leurs États, et les prendrait sous sa protection : il accorda un mois à la ville pour ratifier ce traité. Cette ratification fut suspendue par l’imprudence des partisans de Lodovico ; de sorte que lorsque le roi eut remporté la victoire, ils voulurent ratifier le traité ; mais ce prince rejeta à son tour leur proposition, parce qu’il vit bien que c’était la force, et non la bonne volonté, qui portait les Florentins à embrasser son amitié. Cette conduite coûta des sommes considérables à Florence, et la république fut sur le point de perdre ses États, ainsi que cela lui arriva dans la suite et par la même cause ; faute d’autant plus impardonnable qu’elle n’obligea en rien le duc Lodovico : aussi, si ce dernier était demeuré vainqueur, aurait-il fait tomber sur les Florentins de bien autres marques de ressentiment que le roi.

Quoique j’aie déjà consacré précédemment un chapitre particulier à faire sentir aux républiques le danger auquel expose la faiblesse, néanmoins de nouveaux événements m’ayant donné l’occasion de revenir sur le même sujet, je n’ai pas été fâché d’en parler une seconde fois, parce qu’il m’a semblé que cette matière était de la plus grande importance pour les gouvernements semblables à notre république.