les nouveautés. Cette faveur éclate surtout lorsqu’il s’agit de ces entreprises qui annoncent du courage et qu’exécutent des jeunes gens. En effet, si l’on voit s’élever au sein d’une république un jeune homme doué d’un esprit noble et d’un courage extraordinaire, tous les regards des citoyens commencent à se tourner sur lui ; on lui prodigue imprudemment les honneurs, et s’il ressent l’aiguillon de l’ambition, profitant avec habileté et des dons de la nature et de la faveur des circonstances, il arrive bientôt à un point où les citoyens, revenus trop tard de leur erreur, ne peuvent lui opposer que de faibles obstacles, dont l’emploi même ne fait que l’élever au dernier degré du pouvoir. On pourrait en citer une foule d’exemples ; je me contenterai d’en rapporter un seul qui s’est passé dans notre ville.
Côme de Médicis, qui jeta dans Florence les fondements de la grandeur de sa famille, parvint, par sa sagesse et l’aveuglement de ses concitoyens, à un tel degré d’autorité qu’il commença à inspirer des craintes au gouvernement, de sorte que les autres citoyens pensaient que s’il était dangereux de l’offenser, il l’était bien plus encore de le laisser se maintenir. Niccolô da Uzzano, qui vivait à cette époque, et qui possédait une grande expérience des affaires, ne voulut point, tant qu’il vécut, qu’à la première faute que l’on avait commise en s’aveuglant sur les dangers qui pouvaient résulter de l’influence de Côme, on en ajoutât une seconde, en cherchant à le renverser, convaincu que cette tentative serait la ruine de l’État. Cette prédiction ne s’accomplit que trop après sa mort ; car les citoyens qui lui survécurent, loin de suivre ses conseils, armèrent toutes leurs forces contre Côme et le chassèrent de Florence, où bientôt son parti, qu’avait irrité cette injure, le rappela et le fit pour ainsi dire prince de la république ; élévation à laquelle il n’eût jamais pu atteindre sans l’opposition manifeste qui s’était prononcée contre lui.