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XXI
NICOLAS MACHIAVEL.
II

Telle est, réduite aux simples détails des faits positifs, dégagée des hypothèses qui l’ont défigurée, des événements extérieurs auxquels elle est étrangère, la vie du secrétaire de Florence. Il nous reste maintenant, avant d’arriver à l’histoire et à l’appréciation de ses œuvres, à déterminer quelle fut dans les affaires de son pays sa véritable part d’influence. Ici nous nous trouvons en présence d’un préjugé qui n’a fait que grandir avec le temps. On a présenté le secrétaire florentin comme l’oracle de la politique italienne au seizième siècle ; on lui a attribué une prépondérance souveraine ; on l’a, pour ainsi dire, fait entrer de force dans les événements, et pour confirmer son importance, on a cherché à mettre en relief les détails les plus insignifiants. L’illusion était logique, car il était naturel de croire que l’homme qui avait dévoilé tous les mystères de l’art de gouverner, que l’homme qui était lu par tous les héros de l’histoire moderne, avait exercé sur ses contemporains une véritable fascination, et sur les affaires de son pays une pression irrésistible. C’est là une erreur grave, dans laquelle sont tombés, comme les moutons de Panurge, — qu’on nous pardonne la comparaison, nous sommes en plein seizième siècle, — la plupart des biographes français et des biographes italiens. C’est contre cette erreur qu’il importe de protester, en laissant toutefois le mérite de la rectification à l’un des penseurs les plus éminents de l’Italie moderne, M. J. Ferrari qui, dans sa profonde analyse de Machiavel, établit la vérité avec une force de critique qui ne laisse aucune place à la contradiction sérieuse[1], et dont le beau travail nous a servi de guide, pour rectifier une foule de préjugés

  1. Voyez : Machiavel juge des révolutions de notre temps, par J. Ferrari. Paris, Joubert, 1849, in-8o, et plus particulièrement pour la prétendue influence exercée par Machiavel sur les événements de son temps, le chap. IV intitulé : Machiavel, homme politique.
b.