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XIX
NICOLAS MACHIAVEL.

l’occupèrent en même temps que des œuvres plus légères qui devaient assurer sa renommée dans tous les genres. Ce repos forcé que lui firent les événements, ce repos contre lequel il ne cessait de protester fut l’occasion de sa gloire, et, sans nul doute, s’il était resté secrétaire, sa pensée eût été étouffée par cet esclavage des fonctions publiques qu’on décore souvent bien à tort du nom de dévouement, et qui n’est pour un grand nombre que la mort de l’intelligence.

La Mandragore, le seul des ouvrages de Machiavel qui ait été publié de son vivant, avait reçu du public l’accueil le plus empressé, et si l’on oubliait encore le fonctionnaire, on commençait à s’occuper de l’écrivain. Léon X, en passant à Florence, demanda qu’on représentât devant lui cette comédie déjà célèbre, qui flattait, comme le dit heureusement M. Magnin, son épicuréisme papal, et tout singulier que fût pour un pontife ce programme de spectacle, la Mandragore fut jouée avec un grand succès. Plus tard Machiavel accepta du cardinal Jules de Médicis la proposition d’écrire l’histoire de Florence avec un traitement qui devait être continué aussi longtemps que durerait la composition de l’ouvrage. Fidèle à la maxime qu’il a consignée dans une de ses lettres que plus on obtient des grands, plus il faut demander, il demanda à être employé de nouveau dans la diplomatie. En 1521, on lui confia une mission auprès des frères mineurs de Carpi. Il eut ordre ensuite de surveiller les fortifications de Florence, et de traiter quelques affaires avec François Guicciardin, gouverneur de la Romagne ; enfin il fut employé dans l’armée de la ligue contre Charles-Quint. Ce fut là sa dernière légation.

Machiavel, à cette date, se plaint moins vivement que par le passé de sa situation pécuniaire. C’est qu’en effet cette situation s’était améliorée, comme on le voit par un second testament qui porte la date du 27 novembre 1522. Les héritiers sont, d’une part, Mariette Corsini, qu’il appelle sa femme bien-aimée, ce qui ne prouve pas, comme le veulent quelques commentateurs, qu’il ait toujours été époux fidèle ; et de l’autre, cinq enfants, dont une fille, Bartholomée, et quatre fils, Bernard, Louis, Guido et Pierre. Les parts, qui forment contraste avec celles du premier codicille, sont assez importantes, et se composent de quatre maisons de campagne,