rapprochât d’eux, et elle se comportait à son égard avec modération. Mais à peine les Tarquins furent-ils morts et les nobles eurent-ils cessé de craindre, qu’ils commencèrent à verser sur le peuple le poison qu’ils retenaient dans leur cœur, et à l’accabler de toutes les vexations qu’ils pouvaient imaginer : preuve certaine de ce que j’ai avancé plus haut, que jamais les hommes ne font le bien que par nécessité ; mais là où chacun, pour ainsi dire, est libre d’agir à son gré et de s’abandonner à la licence, la confusion et le désordre ne tardent pas à se manifester de toutes parts. C’est ce qui a fait dire que la faim et la pauvreté éveillaient l’industrie des hommes, et que les lois les rendaient bons. Là où une cause quelconque produit un bon effet sans le secours de la loi, la loi est inutile ; mais quand cette disposition propice n’existe pas, la loi devient indispensable. Ainsi, quand les Tarquins, qui tenaient les grands enchaînés par la terreur qu’ils leur inspiraient, n’existèrent plus, il fallut chercher de nouvelles institutions qui produisissent le même effet que la présence des Tarquins. En conséquence, c’est après les troubles, les murmures continuels et les dangers auxquels donnèrent lieu les longs débats qui s’élevèrent entre les plébéiens et la noblesse, que l’on institua les tribuns pour la sécurité du peuple. L’autorité de ces nouveaux magistrats fut entourée de tant d’honneurs et de prérogatives, qu’ils purent tenir sans cesse la balance entre le peuple et le sénat, et mettre un frein aux prétentions insolentes des nobles.
CHAPITRE IV.
Je ne veux point passer sous silence les désordres qui