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Pour ce qui est du grand principe d’une raison suffisante, tout ce que le savant auteur ajoute ici touchant cette matière ne consiste qu’à soutenir sa conclusion, sans la prouver ; et par conséquent il n’est pas nécessaire d’y répondre. Je remarquerai seulement que cette expression est équivoque ; et qu’on peut l’entendre, comme si elle ne renfermait que la nécessité, ou comme si elle pouvait aussi signifier une volonté et un choix. Il est très certain, et tout le monde convient, qu’en général il y a une raison suffisante de chaque chose. Mais il s’agit de savoir si, dans certains cas, lorsqu’il est raisonnable d’agir, différentes manières d’agir possibles ne peuvent pas être également raisonnables, si, dans ces cas, la simple volonté de Dieu n’est pas une raison suffisante pour agir d’une certaine manière plutôt que d’une autre ; et si, lorsque les raisons les plus fortes se trouvent d’un seul côte, les agents intelligents et libres n’ont pas un principe d’action (en quoi je crois que l’essence de la liberté consiste) tout à fait distinct du motif ou de la raison que l’agent a en vue ? Le savant auteur nie tout cela. Et comme il établit son grand principe d’une raison suffisante, dans un sens qui exclut tout ce que je viens de dire, et qu’il demande qu’on lui accorde ce principe dans ce sens-la, quoiqu’il n’ait pas entrepris de le prouver, j’appelle cela une pétition de principe ; ce qui est tout à fait indigne d’un philosophe.

N. B. La mort de M. Leibniz l’a empêché de répondre à cette cinquième réplique.

fin du tome premier