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particuliers. Et comme tous les lieux sont originairement semblables (quand même le lieu ne serait que la situation des corps), si Dieu place un cube de matière derrière un autre cube égal de matière, plutôt qu’au rebours, ce choix n’est pas indigne de la perfection de Dieu, quoique ces deux situations soient parfaitement semblables ; parce qu’lil peut y avoir de très bonnes raisons pour l’existence de ces deux cubes, et qu’ils ne sauraient exister que dans l’une ou l’autre de ces deux situations également raisonnables. Le hasard d’Épicure n’est pas un choix, mais une nécessité aveugle.

19. Si l’argument que l’on trouve ici prouve quelque chose, il prouve (comme je l’ai déjà dit ci-dessus, § 3) que Dieu n’a créé, et même qu’il ne peut créer, aucune matière ; parce que la situation des parties égales et similaires de la matière était nécessairement indifférente dès le commencement, aussi bien que la première détermination de leur mouvement, d’un certain côté, ou du côté opposé.

20. Je ne comprends point ce que l’auteur veut prouver ici, par rapport au sujet dont il s’agit.

21. Dire que Dieu ne peut donner des bornes à la quantité de la matière, c’est avancer une chose d’une trop grande importance pour l’admettre sans preuve. Et si Dieu ne peut non plus donner de bornes à la durée de la matière, il s’ensuivra que le monde est infini et éternel nécessairement et indépendamment de Dieu.

22 et 23. Si l’argument que l’on trouve ici était bien fondé, il prouverait que Dieu ne saurait s’empêcher de faire tout ce qu’il peut faire ; et par conséquent qu’il ne saurait s’empêcher de rendre toutes les créatures infinies et éternelles. Mais, selon cette doctrine, Dieu ne serait point le gouverneur du monde : il serait un agent nécessaire, c’est-à-dire qu’il ne serait pas même un agent, mais le destin, la nature et la nécessité.

24-28. On revient encore ici à l’usage du mot de sensorium, quoique M.  Newton se soit servi d’un correctif, lorsqu’il a employé ce mot. Il n’est pas nécessaire de rien ajouter à ce que j’ai dit sur cela.

29. L’espace est le lieu de toutes les choses et de toutes les idées comme la durée est la durée de toutes les choses et de toutes les idées. J’ai fait voir ci-dessus que cette doctrine ne tend point à faire Dieu l’âme du monde. Il n’y a point d’union entre Dieu et le monde. On pourrait dire, avec plus de raison, que l’esprit de l’homme est l’âme des images des choses qu’il aperçoit, qu’on ne petit dire que Dieu est