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nouveaux essais sur l’entendement

quences, on n’arrivera pas avec des dépenses royales à ce qu’un homme d’une grande pénétration pouvait découvrir d’abord. M.  Descartes [1], qui l’était assurément, a fait une remarque semblable dans une de ses lettres à l’occasion de la méthode du chancelier d’Angleterre ; et Spinosa [2] (que je ne fais point de difficulté de citer, quand il dit de bonnes choses), dans une de ses lettres à feu M.  Oldenbourg [3], secrétaire de la Société royale d’Angleterre, imprimées parmi les œuvres posthumes de ce juif subtil, fait une réflexion approchante sur un ouvrage de M.  Boyle, qui s’arrête un peu trop, pour dire la vérité, à ne tirer d’une infinité de belles expériences d’autre conclusion que celle qu’il pouvait prendre pour principe, savoir que tout se fait mécaniquement dans la nature, principe qu’on peut rendre certain par la seule raison et jamais par les expériences, quelque nombre qu’on en fasse.

§ 14. Ph. Après avoir établi des idées claires et distinctes avec des noms fixes, le grand moyen d’étendre nos connaissances est l’art de trouver des idées moyennes, qui nous puissent faire voir la connexion ou l’incompatibilité des idées extrêmes. Les maximes au moins ne servent pas à les donner. Supposé qu’un homme n’ait point d’idée exacte d’un angle droit, il se tourmentera en vain à démontrer quelque chose du triangle rectangle, et quelques maximes qu’on emploie on aura de la peine à arriver par leurs secours à prouver que les

  1. Descartes. Nous avons négligé jusqu’ici de résumer la vie et les travaux de cet illustre philosophe, né à la Haye en Touraine en 1596, mort à Stockholm en 1650. Il passa en Hollande la plus grande partie de sa vie. Ses principaux ouvrages sont : Le Discours de la Méthode, Leyde, 1637 : Meditationes de primâ philosophiâ, in-4o, Amsterdam, 1644, trad. en franç. par le duc de Luynes, Paris, 1647 ; les Passions de l’âme, in-8o, Amsterdam, 1649 ; Principia philosophiæ, in-4o, Amsterdam, 1644, trad. par Picot, Paris, 1647, — Il y a plusieurs éditions de ses œuvres complètes dont la plus ancienne est celle d’Amsterdam, 8 vol.  in-4o, 1670-1683, et la plus complète celle de M.  Cousin, 11 vol.  in-8o, Paris, 1824-1826. Il se publie en ce moment (1897) une nouvelle édition des œuvres complètes de Descartes, par les soins de MM.  Charles Adam et Paul Tannery. P. J.
  2. Spinosa, illustre philosophe, né à Amsterdam en 1632, d’une famille de juifs portugais, mort en 1677. — Ses principaux ouvrages sont : Renati Descartes principia, Amsterd., 1663 ; Tractacus theologico-politicus, Opera posthuma, l’Ethica, le Tractacus politicus, le De Emendatione intellectus. On a trois éditions complètes de Spinosa : celle de Paulus, 2 grav. in-8o, Iéna, 1803, et celle de Gfrœrer (Corpus philosophorum), t.  III, Stuttgart, 1830, et enfin celle de Van Vloten et Land, La Haye, 1882. Il a paru récemment à Amsterdam (1862) un volume d’œuvres inédites, sous ce titre : Ad opera Ben. Spinosa supplementum. Une traduction française de Spinosa a été donnée par Em. Saisset. Paris, 3 vol.  in-18, 1842. P. J.
  3. Oldenbourg, secrétaire de la Société royale de Londres, publia Philosophical Transactions de 1664 à 1677, mort en 1678, a traduit en anglais le Prodromus de solidis Nic. Stenon. P. J.